Sainte-Clotilde : un joyau du romantisme français
La basilique Sainte-Clotilde, avec ses deux flèches néogothiques dressées au cœur du VIIe arrondissement de Paris, est non seulement un chef-d’œuvre architectural, mais aussi le berceau d’un des plus célèbres instruments conçus par Aristide Cavaillé-Coll. En 1859, le facteur d’orgues livre à Sainte-Clotilde un orgue novateur, spécialement adapté à la nouvelle esthétique romantique. Ce chef-d’œuvre deviendra l’un des instruments les plus influents de son temps, notamment grâce à son premier titulaire, César Franck.
Un orgue pour une nouvelle époque musicale :
Lorsque la construction de l’église Sainte-Clotilde s’achève au milieu du XIXe siècle, la paroisse souhaite se doter d’un instrument à la hauteur de son architecture audacieuse. Cavaillé-Coll, alors à l’apogée de sa carrière, est chargé de concevoir un orgue qui dépasse les standards classiques de l’époque. L’orgue est inauguré en 1859 et devient rapidement un modèle pour les orgues dits “symphoniques”, marquant la transition entre tradition liturgique et expression orchestrale.
Avec ses 46 jeux d’origine répartis sur trois claviers manuels et un pédalier, l’instrument s’impose par sa richesse harmonique, son expressivité, et sa capacité à accompagner aussi bien la liturgie que les grandes œuvres du répertoire romantique. César Franck, organiste titulaire jusqu’à sa mort, qualifie l’orgue de “si souple sous mes doigts et si obéissant à mes pensées”, soulignant la parfaite adéquation entre l’instrument et l’interprétation romantique.
Les transformations au fil des décennies :
Au cours du XXe siècle, l’orgue de Sainte-Clotilde connaît plusieurs transformations visant à étendre ses possibilités sans trahir l’esprit de Cavaillé-Coll. En 1933, sous l’impulsion de Charles Tournemire, l’instrument est agrandi par la maison Beuchet, atteignant 56 jeux.
En 1962, sous la direction de Jean Langlais, une nouvelle intervention ajoute un positif expressif, électrifie la traction, et augmente le nombre total de jeux à 60.
L’objectif est clair : rendre l’orgue plus polyvalent pour les besoins liturgiques, pédagogiques, et concertants du XXe siècle. Une restauration importante menée entre 1999 et 2005 par Bernard Dargassies, avec l’appui de Jacques Taddei et d’Olivier Penin, permet de réintégrer des jeux historiques, de restaurer les tuyauteries originales, et de doter l’orgue d’une console mobile dans la nef, facilitant la visibilité lors des concerts. Aujourd’hui, l’orgue dispose de 71 jeux.
Caractéristiques de l’instrument actuel :
• Composition : 71 jeux, répartis sur trois claviers manuels et un pédalier.
• Tuyauterie : Un nombre important de jeux originaux de Cavaillé-Coll sont encore présents, notamment dans le Grand-Orgue et le Récit.
• Innovations : Console mobile à quatre claviers, chamades ajoutées, transmission électromécanique modernisée.
• Esthétique sonore : Riche en anches, fonds et jeux expressifs, l’orgue conserve son caractère symphonique tout en répondant aux besoins de la musique contemporaine.
Le buffet d’origine, d’inspiration néogothique, conçu par François-Christian Gau, est toujours en place, avec ses pinacles et ses frises finement sculptées. Il s’harmonise parfaitement avec l’architecture de la basilique.
Un son au service de l’inspiration romantique :
L’orgue de Sainte-Clotilde n’est pas un simple instrument liturgique : c’est un outil d’inspiration. Grâce à la vision de Cavaillé-Coll, il devient le compagnon idéal des compositeurs du romantisme français. César Franck y compose une grande partie de son œuvre organistique, développant un langage musical puissant, introspectif, et spirituel, indissociable de la sonorité de l’orgue.
Par la suite, des figures majeures comme Gabriel Pierné, Charles Tournemire, ou Jean Langlais perpétuent cette tradition en s’appuyant sur les qualités expressives uniques de l’instrument.
Ci-contre,
Olivier Penin interprète la Chaconne BWV 1004 de J.S. Bach au grand orgue manufacturé par Aristide Cavaillé-Coll.
©Vincent Hildebrandt
Un héritage vivant :
Loin d’être figé, l’orgue de Sainte-Clotilde continue d’évoluer. Aujourd’hui, Olivier Penin, titulaire depuis 2012, poursuit l’œuvre de ses prédécesseurs en alliant tradition et modernité. Concerts, enregistrements et messes y témoignent d’un instrument toujours en activité, porté par une vision fidèle à l’esprit de Cavaillé-Coll.
Grâce aux restaurations minutieuses et à l’entretien régulier, cet orgue reste un pilier du paysage musical parisien. Il attire chaque année des milliers de visiteurs, musiciens et mélomanes, venus écouter sa voix puissante résonner sous les voûtes de la basilique.
Un monument de la facture d’orgue française :
L’orgue de Sainte-Clotilde demeure l’un des exemples les plus aboutis du génie d’Aristide Cavaillé-Coll. Il incarne non seulement une époque, mais aussi une vision : celle d’un orgue symphonique, capable d’émouvoir, de prier, de chanter. À travers ses jeux, ses restaurations, ses organistes, il traverse les siècles en conservant cette puissance expressive qui a marqué l’histoire de la musique sacrée.
Infos Pratiques :
Horaires d'ouvertures (hors jours fériés) :
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Samedi et dimanche : de 10h00 à 20h00
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